13 février 2015 | Posted in:7-Le goût du jour (archives)

A l’honneur aujourd’hui, le chef Jean Imbert et son restaurant l’Acajou, situé dans le 16ème arrondissement de Paris.

Jean-Imbert-AcajouMalgré son évidente jeunesse (31 ans) et son allure pour le moins adolescente, Jean Imbert n’est pas un débutant, loin de là… Après avoir obtenu son diplôme de l’Institut Paul Bocuse en 2001, il fait ses armes auprès de Eric Briffard (chef des cuisines du restaurant Le Cinq**, à l’hôtel Georges V) ou encore de Marc Meneau (également doublement étoilé pour son restaurant l’Espérance, en Bourgogne) C’est alors que Jean Imbert décide de se jeter à l’eau. Selon ses propres mots, c’est avec beaucoup d’inconscience qu’il ouvre en 2004, alors qu’il n’a que 22 ans, son restaurant l’Acajou. Il s’y épanouit dans sa propre cuisine et y rencontre un joli succès.

C’est en 2011, alors qu’il est à l’étranger, qu’il est contacté pour participer à la troisième saison de l’émission Top Chef, qu’il décline dans un premier temps. Après plusieurs entretiens téléphoniques et sous l’insistance de la production, il finit par accepter et gagne le concours en 2012.

C’est donc pleine de curiosité pour le travail de ce jeune chef que j’ai décidé de découvrir sa cuisine à l’Acajou.

Tout d’abord, le restaurant. Entièrement rénové il y a 3 ans, il tient son nom de l’immense table en acajou massif, qui trône en son centre. Cette table d’hôtes peut recevoir une vingtaine de personnes. Bien sûr, il faut apprécier le coté convivial de la chose car vous ne pourrez pas ignorer vos voisins ou vous faire ignorer d’eux. Si vous souhaitez plus d’intimité, précisez-le lors de votre réservation, vous serez installé sur l’une des trois tables (de deux personnes) de la salle principale ou encore dans la salle secondaire, un petit cube blanc, équipé de banquettes en cuir, à l’éclairage cosy et pouvant recevoir une dizaine de personnes. Je dirais dans l’ensemble que le cadre est plutôt charmant et invite aux longues conversations entre amis.

Le personnel quant à lui est jeune, très avenant et disponible, souriant et sans fausses notes.

Le concept de cuisine bistronomique n’est pas toujours très clair, mais de ce que j’en comprends, on pourrait rapprocher la cuisine de l’Acajou de cette idée. En effet, on y retrouve un certain nombre de codes du bistrot, notamment le cadre convivial d’un restaurant de quartier, un menu présenté collectivement sur une grande ardoise, le choix de produits simples et des plats peu sophistiqués. Tout cela complété par des touches plus gastronomiques comme un amuse-bouche en début de repas, du beurre façon Bordier au piment d’Espelette accompagné d’un excellent pain aux graines de pavot et un service en trois plats.

Concernant la cuisine elle-même j’avoue être partagée car je suis allée d’excellentes surprises en petites déceptions. La première impression fût excellente avec le shot d’artichaut en amuse-bouche. Servie chaude, cette crème d’artichaut sur fond de lait de coco avec une petite note de citronnelle en arrière bouche nous a mis en joie. Le goût était profond et doux, la texture onctueuse et l’équilibre sans faute grâce à cette pointe d’acidité. Pour la suite, le service se fait en trois plats à choisir parmi 8 propositions du chef, pour finir par du fromage et un dessert en deux parties.

À l’arrivée des entrées, pas de grandes surprises sur la présentation, esthétique et soignée. J’ai personnellement choisi les tomates anciennes (a priori, de la Noire de Crimée, de la Green Zebra, une variété de Coeur de Boeuf, peut-être de l’Orange Banana, mais je n’ai pas tout identifié…) et leurs toasts fourrés au Comté dont le goût et l’assaisonnement ne m’ont pas particulièrement transportés. La belle surprise est venue de la petite salade de graines germées, de coriandre, d’estragon et autres herbes aromatiques arrosée d’une eau de tomate chaude, qui accompagnait les tomates. Au bout de quelques instants, on se retrouve avec une infusion aromatique incroyable en goût et en parfum, une vraie merveille. Mon mari a choisi, quant à lui, l’oeuf fermier cuit façon cocotte dans une crème de haricots de Paimpol et petits dés de chorizo, à la fois goûteux et crémeux, vraiment très sympa. Les plats suivants étaient bons: des ravioles de langoustines et foie gras pour mon mari, qui les a trouvées un peu trop grasses à son goût (bien sûr le foie gras c’est gras par définition mais il y avait trop de graisse fondue dans le fond du bol) quant à moi, j’ai choisi des filets de maquereaux marinés accompagnés d’une crème d’avocat au wasabi et un carpaccio de pomme Granny Smith. Clairement d’influence asiatique ce plat manquait du petit quelque chose qui fait la différence. Malgré tout, l’association maquereaux/avocat/pomme granny marche très bien. C’est au moment des plats que ça s’est compliqué, car si le canard aux figues de mon mari était bon mais assez commun, mon plat de lotte cuite à basse température m’a causé du souci… La première chose qui m’a posé problème, c’est la cuisson de la lotte. Je ne sais pas si ce poisson (que j’adore habituellement) supporte vraiment cette cuisson à basse température qui réussit si bien aux poissons gras. On obtient une texture dont on ne sait dire si le poisson est trop cuit ou pas assez, vraiment très perturbante. Ensuite, cette lotte se trouve posée sur une tapenade d’olives vertes très forte en amertume puis recouverte d’une émulsion citronnée. La superposition de l’acidité du citron et de l’amertume de l’olive affole totalement les papilles et devient très rapidement déplaisante. Les floraisons de choux fleurs, graffitis et romanesco présentes pour rajouter du croquant n’y ont rien changé, je n’ai pas aimé ce plat. Pour finir, nous avons goûté un excellent Saint Nectaire puis le repas s’est terminé par le dessert: un financier (à la pistache?) garni d’une crème au beurre et de fraises de Plougastel ainsi qu’une mousse légère au chocolat et beurre salé parsemée de pralin et autres fruits secs grillés et caramélisés. Je n’apprécie pas particulièrement le sucré mais j’ai trouvé ce dessert très bon, particulièrement la mousse au chocolat.

Mon avis, pour ce qu’il vaut, est que la cuisine de Jean Imbert est pleine de promesses. Sa jeunesse et son talent ne manqueront pas de l’emmener loin mais il reste bien du chemin à parcourir avant de se frotter à ses pairs étoilés. Comme toute une génération de jeunes chefs, Jean Imbert est marqué par le choix et le respect des produits, formé par des chefs parmi les plus grands, il maitrise le geste et propose une cuisine inventive et sincère. L’expérience et le temps feront sans doute de lui un grand chef, il va donc falloir le suivre de près…

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