L’impact de l’élevage sur l’environnement

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28 mars 2014 | Posted in 5-Le goût de la nature | By

Dans un article précédent intitulé Être ou ne pas être végétarien j’évoquais le problème de la consommation croissante de viande à l’échelle mondiale et les dégâts causés par l’élevage à l’environnement. Comme je le disais, c’est un vaste sujet qui fait régulièrement l’objet d’études internationales et d’analyses en tout genre.

Avant d’aborder ce thème, j’ai parcouru longuement le Net à la recherche de la source d’informations fiables qui me permettrait d’écrire un article sérieux. J’ai constaté que la grande majorité du contenu disponible à ce sujet repose sur le même document : le rapport de la Food and Agriculture Organization pour les Nations Unies datant de 2006 et intitulé « Livestock’s long shadow, environmental issues and options » Comme son nom l’indique, ce document a pour vocation de définir précisément l’impact environnemental de l’élevage à travers le monde. J’ai choisi de compléter cette lecture par un second rapport de la FAO datant de 2009 et intitulé La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture afin de disposer de chiffres plus récents (2006 ça commence tout de même à remonter…)

J’ai donc étudié avec attention ce dernier rapport, somme toute extrêmement riche et intéressant, et je vous en livre ici ma synthèse personnelle (pour le coup, très synthétique!)

D’abord les derniers chiffres:

  • L’élevage est le premier utilisateur des ressources de la planète: les pâturages et les terres cultivés pour le fourrage représente 80% de la surface agricole totale
  • L’élevage représente 40% de la production agricole mondiale
  • La production d’aliments pour bétail occupe 33% des terres cultivables
  • Les pâturages occupent 26% de la superficie terrestre non couverte par les glaces
  • L’élevage contribue à hauteur de 18% des émissions de gaz à effet de serre due à l’activité humaine

Lire les chiffres froidement de la sorte n’a bien sûr pas beaucoup d’intérêt. Ce qui est intéressant, c’est de les inscrire dans un contexte:

La croissance économique et démographique rapide de nombreux pays en développement augmente considérablement la demande, déjà forte, des pays riches en matière de produits d’origine animale. La FAO estime que cette demande augmentera de 70%  d’ici à 2050. Pour répondre à cette consommation croissante, l’humanité s’est progressivement dirigée vers un mode d’élevage intensif.

Première conséquence: la sur-exploitation des terres.

Les pâturages occupent plus du quart des terres émergées du globe (libres de glace) et la production fourragère un tiers des terres cultivables. La pression de l’élevage augmente continuellement et participe grandement à la déforestation de nombreuses régions du monde pour la mise en pâture du bétail (notamment en Amérique Centrale et en Amérique du Sud) De même, l’intensification de la production animale entraine un surpâturage qui dégrade les sols (dégradation de la végétation, érosion des sols, perte de biodiversité par la destruction des écosystèmes naturels) La culture fourragère est, elle aussi, responsable en grande partie de l’appauvrissement et de l’érosion des sols ainsi que de la perte de biodiversité.

Deuxième conséquence: le tarissement et la pollution de l’eau.

Le secteur de l’élevage représente environ 8% de la consommation mondiale d’eau, destinée principalement à l’irrigation des cultures fourragères. L’industrialisation de l’élevage animal et la transformation des produits augmentent encore les besoins en eau. De plus, en raison de la forte concentration animale, la quantité de fumier produite est souvent très supérieure à la capacité d’absorption des sols et devient nuisible à l’environnement. La difficulté à stocker puis à transporter ces déjections est telle qu’il n’est économiquement pas rationnel pour les producteurs d’organiser un circuit commercial pour valoriser ces déchets. Ils finissent donc bien souvent par être déversés dans les cours d’eau. On constate ainsi une véritable pollution de l’eau en surface et des eaux souterraines en azote, phosphore et autres substances pathogènes. Les écosystèmes marins et côtiers sont eux aussi affectés par l’acidification de l’eau. De même, la culture fourragère à travers l’épandage de produits chimiques, pollue les nappes phréatiques et le surpâturage bouleverse le cycle naturel de l’eau par le tassement et/ou l’érosion des sols.

Troisième conséquence: le réchauffement climatique.

L’interaction entre l’élevage et le changement climatique est à présent avérée. Malgré tout, le calcul des émissions de gaz à effet de serre dues à l’élevage est quelque peu compliqué car il implique plusieurs secteurs économiques distincts: la production d’aliments pour animaux entre dans les catégories de l’agriculture et de la foresterie (par le biais de la conversion des terres) mais aussi dans les catégories du transport et de l’énergie. Les activités d’élevage qui impliquent ce qu’on appelle la fermentation entérique (comprenez les pets des ruminants) et la gestion du fumier entrent également dans la catégorie agriculture. Quant à l’abattage, il est comptabilisé dans l’industrie, l’énergie et le transport. La chaine de l’élevage produirait donc, en équivalent de CO2, 18% des émissions de gaz à effet de serre produits par l’homme.

Dernière conséquence: la contamination aux médicaments.

La concentration animale et la proximité avec des populations humaines posent depuis longtemps des problèmes d’ordre sanitaire. Les épizooties qui parviennent à se transmettre à l’homme représentent un véritable enjeu de santé publique (la plupart des souches de la grippe sont d’origine animale). Pour tenter d’éviter ces épisodes infectieux, les producteurs utilisent massivement des médicaments, à titre préventif, de manière quasi-systématique. Les résidus de ces médicaments se retrouvent non seulement dans le produit animal (viande, oeuf, lait…) mais aussi dans l’environnement (déjections animales). L’antibiorésistance est à présent une préoccupation sanitaire mondiale (voir l’article Être ou ne pas être végétarien pour plus d’informations)

Mais alors, qui doit faire quoi??

Avant tout, il faut pousser les dirigeants à prendre leurs responsabilités et ne plus freiner les politiques environnementales sous la pression des grands producteurs.

Ensuite, il faut règlementer, à l’échelle de la planète, l’accès aux ressources collectives (eaux, sols, forêts…) sous le contrôle des Nations Unies, pour stopper le pillage du bien commun au profit de quelques-uns.

Et enfin, il faut que chacun d’entre nous remplissent son assiette de légumes et non de viande !! Le Programme des Nations Unies pour l’Environnement appelle les pays développés à réduire de 50% leur consommation de viande à l’horizon 2050.

Il est absolument nécessaire de réduire l’impact environnemental de notre alimentation pour limiter la pollution de l’eau et des sols qui affecte le climat et la biodiversité. Il faut changer ses habitudes alimentaires et se placer au coeur de l’action environnementale. Nous pouvons tous faire quelque chose de concret, même si tout n’est pas parfait, et s’inscrire dans une démarche responsable pour l’avenir de l’humanité.

Commencez par éliminer les ruminants de votre alimentation (boeuf, mouton, chèvre…) pour réduire la déforestation et les gaz à effet de serre. Si vous voulez aller plus loin, ne consommez plus de porcs et vous participerez à réduire la pollution des sols et de l’eau. Privilégiez la volaille, dont l’impact de l’élevage est moindre et les besoins en ressources faibles. Consommez Bio, et vous respecterez davantage le bien-être animal et l’environnement ainsi que votre propre santé. Et quand vous en serez là, il ne vous restera plus qu’un pas à faire pour devenir végétarien si le coeur vous en dit. Mais quoi que vous fassiez, des petits ou des grands efforts, vous aurez fait le bon choix et les générations futures vont en seront infiniment reconnaissantes…

Être ou ne pas être végétarien?

vegetarien

22 février 2014 | Posted in 4-Le goût des produits | By

J’ai décidé d’aborder cette épineuse question pour mon premier article dans cette rubrique car je dois vous expliquer pourquoi vous ne trouverez pas certains produits dans mes recettes. Inutile de perdre de temps, non, je ne suis pas végétarienne, mais j’y travaille !

Albert Einstein a dit « Rien ne pourra être plus bénéfique à la santé humaine, ni accroître les chances de survie de la vie sur Terre, qu’une évolution vers un régime végétarien »

En une seule phrase, ce cher Albert met le doigt sur toute la complexité de cette question. Je suis toujours très embêtée quand il s’agit d’aborder ce sujet avec mon entourage car je ne suis déjà pas au clair avec moi-même. Comme je le disais, je ne suis pas végétarienne (entendez qui ne mange AUCUN animal: ni mammifères, ni volatiles, ni poissons, ni mollusques) mais je ne suis pas non plus totalement omnivore. Je sais que cette posture agace prodigieusement les vrais végétariens qui ne supportent pas les nouveaux concepts farfelus que nous inventent les magazines féminins régulièrement, et je les comprends. Pourtant, nous n’arrivons pas tous à aboutir à une pratique bien tranchée, car disons-le, nous sommes culturellement conditionnés à manger de la viande. Tout n’est donc pas tout blanc ou tout noir, personnellement je nage dans le gris…

Cependant, il m’apparait depuis plusieurs années qu’il est absolument nécessaire de tendre vers un régime alimentaire végétarien et cela pour plusieurs raisons.

La première et, pour moi, la plus importante, est la problématique environnementale. Les dégâts causés par l’élevage, qu’il soit intensif ou non, sont considérables, notamment sur la dégradation des terres et de la biodiversité, la pollution des eaux et le réchauffement climatique. L’élevage serait responsable de presque 20% des émissions de gaz à effet de serre. C’est un sujet très vaste, auquel je consacre un article complet: L’impact de l’élevage sur l’environnement.

La seconde provoque tout autant de dégâts: la spéculation sur les matières premières. En effet, la consommation grandissante de viande, particulièrement de boeuf, sous l’impulsion des pays occidentaux, largement suivis par les pays émergents, déstabilise totalement le marché mondial des matières premières. Les pays à forte consommation de viande sont aussi les plus riches et les plus influents. Une quantité considérable de produits céréaliers sont nécessaires pour l’engraissage des bêtes et, bien sûr, il faut les obtenir au meilleur prix. Un pan entier du système financier est consacré au marché des matières premières et des mécanismes complexes ont été mis en place pour s’accaparer la plus grande partie de la production mondiale. Résultat, les pays les plus pauvres, n’ayant pas de moyens comparables, se voient dans l’incapacité d’acheter parfois ce qu’ils ont eux même produit quelques mois auparavant. Il faut savoir que 80% de l’alimentation animale est issue de cultures qui pourraient convenir à l’alimentation humaine et ainsi épargner à bon nombre de populations des crises alimentaires majeures.

La troisième raison est plus idéologique: le respect de l’animal. Dans l’absolu, je n’ai rien contre le fait de manger de la viande si on a chassé l’animal (je ne parle évidemment pas de la chasse « loisir ») Je pense sincèrement que si chacun devait tuer soi même l’animal qu’il veut manger, il y aurait bien plus de végétariens. Et c’est bien ça le problème. Nous n’avons plus la conscience de ce qu’implique notre consommation de viande. Quand je me promène dans les rayons de mon supermarché, je suis toujours frappée par les efforts considérables que déploient les industriels pour nous faire oublier ce qui se cache dans ces emballages soignés. Voici un chiffre effrayant: on abat 1900 animaux PAR SECONDE à travers le monde pour la consommation de viande. On estime à 110 milliards le nombre d’animaux tués tous les ans dès 2050. L’industrialisation mondialisée de l’élevage et de l’abattage de centaines de milliards d’animaux est, de mon point de vue, une abomination dont nous devrions tous être profondément choqués et honteux. Au delà des conditions d’élevage je n’évoquerais même pas la question de l’opaque industrie des abattoirs dont les rares images que l’on connait sont tellement insoutenables que je vous laisse les trouver par vous même.

La dernière raison est celle de la santé. Evidemment, on se doute bien qu’une telle industrialisation est profondément contre-nature et Dame Nature nous le rappelle fréquemment. Nombreuses sont les maladies, infections, virus qui déferlent régulièrement sur ces animaux dont l’existence est déjà misérable. Mais plutôt que de prendre conscience de notre erreur, nous mettons toutes nos connaissances médicales au service de l’élevage. Résultat, on gave les animaux d’antibiotiques à titre préventif au point que certaines bactéries développent une résistance au traitement. Ces bactéries, auparavant sensibles à l’antibiotique ne sont plus détruites ou leur multiplication n’est plus stoppée. C’est ce qu’on appelle l’antibiorésistance. Pour être clair, on rend des bactéries indifférentes à toute forme de traitement et cette résistance parvient à se transmettre, dans l’environnement, à d’autres bactéries et est à l’origine de nouvelles résistances croisées à des antibiotiques de la même famille. Les conséquences de cette évolution peuvent s’avérer dramatiques à terme: en l’absence de nouveaux antibiotiques nous serions dans l’incapacité de traiter efficacement certaines infections animales mais aussi humaines.

Nous avons donc toutes les raisons de devenir végétarien. Oui mais voilà, même quand on a conscience de toutes ces choses et même quand on a la volonté de changer, ça ne suffit pas toujours. Renoncer à la viande n’est pas si facile au quotidien, surtout quand on sait qu’on estime à moins d’un million le nombre de végétariens en France. Autant dire que cette pratique est tellement marginale qu’elle n’est facilitée ni socialement, ni commercialement. Mais, partant du principe que le mieux est l’ennemi du bien, ce n’est pas parce que ce n’est pas parfait que ça ne vaut rien. J’ai donc décidé de réfléchir à ma consommation et de faire les arbitrages suivants:

Première chose: aucun mammifères. Tout simplement parce que j’en suis un moi-même et qu’une logique primaire m’a immédiatement poussée dans cette direction. J’ai donc choisi de ne pas du tout consommer de membre de ma « famille » (scientifiquement, on appelle ça un taxon) On oublie donc le cochon, le boeuf, le mouton, a fortiori s’il s’agit de « bébés » (veau, agneau, etc) Bien entendu, la consommation de viande de cheval ou de lapin est absolument inenvisageable pour moi.

Deuxième chose: Toute viande consommée doit être Bio, c’est un point non négociable. La seule concession sur ce sujet sera faite à la volaille labellisée (Label Rouge par exemple) qui est très proche du cahier des charges du Bio. On fera au maximum en sorte que cette viande soit d’origine française (évitez à tout prix les viandes venues d’Allemagne, d’Europe de l’est et d’Amérique latine). Ainsi, vous aurez la garantie que les animaux ont été élevés dans le respect de leur bien-être, qu’ils auront reçu une alimentation adaptée à leur nature et qu’ils auront été abattus à un âge plus avancé. Evidemment, reste le problème de l’abattage pour lequel je n’ai pas encore réussi à progresser.

Troisième chose: Aucune préparation industrielle (plats cuisinés, pizzas, quiches, conserves…) contenant de la viande. Vous y gagnerez je vous assure, car l’origine des viandes utilisées est particulièrement incertaine. Elles se constituent de ce que l’on appelle le minerai, c’est à dire des chutes de viande produites pendant la découpe qui proviennent de partout dans le monde et sont absolument intraçables.

A ce jour, je réussis à ne consommer que de la volaille Bio une à deux fois par semaine maximum (dinde, poulet, canard) toujours sous la forme de produit brut que je travaille moi même. Je m’assure ainsi de la qualité sanitaire et éthique de ce que je consomme.

Pour ce qui est du poisson, il faut également être très vigilant. Le choix entre l’élevage et le sauvage, la gestion des ressources et la saisonnalité sont des critères fondamentaux à prendre en compte. Il s’agit là aussi d’un sujet à part entière auquel je vais consacrer très prochainement un article dédié. En tout état de cause, la fréquence de consommation du poisson ne peut pas excéder celui de la viande (1 à 2 fois/semaine max) et les principes d’éthiques doivent s’appliquer de la même façon. Concernant les mollusques et fruits de mer, j’avoue que mon ignorance en la matière et le fait que je n’en apprécie que très peu limite ma réflexion. Je consomme presque exclusivement des crevettes, des langoustines et des coquilles St Jacques (bretonnes bien sûr).

Mais alors sur quelles bases doit on faire reposer son alimentation au quotidien? D’abord sur les céréales comme le blé, le riz ou le maïs sous leurs différentes formes (entiers en grain ou partiellement concassés, en farine, ou encore en lait) mais également sur les légumineuses (c’est à dire de plantes dont le fruit est une gousse dont on récupère les graines utilisées comme légumes) comme par exemple les fèves, les haricots ou les lentilles, les fruits et les légumes bien sûr mais aussi les produits laitiers (lait, beurre, fromage) et les oeufs. En ajoutant de toutes petites quantités de viande et de poisson soigneusement sélectionnés vous aboutirez à un régime alimentaire parfaitement équilibré et raisonné. Pour les plus accros à la viande qui vivraient cela comme une privation, il reste la solution des substituts, à savoir le tofu, le seïtan ou le tempeh que vous trouverez en BioCoop mais aussi des marques industrielles assez innovantes et particulièrement convaincantes comme la marque Tivall, disponible au rayon casher de certain supermarché.

Vous savez donc maintenant ce que vous ne trouverez pas sur ce blog et surtout pourquoi.